Denis NIDOS

"Légumes à la métaphore"


© Denis NIDOS 2000 - Tous droits réservés
 

Du 29 juillet au 13 août 2000
Salle Municipale de Mortemart (Haute-Vienne)

Ouvert tous les jours de 15 h à 18 h 30
Entrée libre


 

La table de Denis NIDOS

Des légumes ? Et pourquoi pas des fleurs ? Des femmes ? Pourquoi pas ne pas saisir le Périgord si riche, si beau, si tendre au point de devenir un recueil de cartes postales ?
Denis Nidos aime surprendre. Se surprendre et nous surprendre. Il aime la vie en marge et au centre. En noir et blanc aussi. Alors, saisir des légumes, leur donner une place émotionnelle dans le panthéon de la vie, c'est rendre un hommage à ces précieux légumes qui ne sont plus des Sans Domicile Fixe de l'image et deviennent au fil des clichés ce que Roland Barthes décrivait en ces quelques mots : « se mettre à table est affaire de langage.» Et Denis Nidos nous ouvre une table inédite, exceptionnelle, joyeuse, interpellative, captivante, étrange. Tout
simplement sa table, en forme de photographies noir et blanc sur l'Art de la vie de nos plantes potagères est magistrale. Au sens étymologique il s'entend. Brillat-Savarin, le célèbre gastronome, qui fit une éloge du règne végétal dans certains de ses écrits aurait été enchanté par ces visions photographiques. Un végétal que la symbolique retient comme l'unité
fondamentale de la vie. De nombreux textes montrent le passage du végétal à l'animal, à l'humain et au divin. Inversement aussi. Fulbert-Dumonteil, autre prestigieux critique gastronomique, disciple de Brillat-Savarin, dans un de ses ouvrages n'écrit-il point ; «Faisant l'autre soir un tour de jardin, j'entendis tout à coup des voix singulières qui s'élevaient des plates-bandes. C'était des légumes qui causaient. Assez surpris, ma fois, j'écoutais leurs confidences intimes.» La nourriture désirée par Denis Nidos, plaisir de l'image, désir d'une
communion profonde avec ce monde mystérieux d'où nous sommes issus, devient une mise en scène en forme de cérémonie ethnographique. Une ethnographie des sens, qui transcende la poésie de nos jardins, marchés et tables, pour inviter à la poésie de la vie. Serions-nous des légumes ? Ou ceux-ci seraient-ils humains ? J'entends Raymond Devos revisant son fameux sketch du chien qui parle et de l'homme qui finit par ... aboyer. Le pire, c'est que la table de Denis Nidos devient cruelle au point de donner la vie à nos petits cucurbitacés et de prolonger la réflexion d'un végétarien tel que Albert Einstein qui disait : «le jour viendra où les hommes proscriront le meurtre des animaux comme ils proscrivent le meurtre de leur semblable.» Jean-François Revel, le philosophe, souligne que «l'histoire de la gastronomie est une lutte perpétuelle entre la tradition et l'invention.» Nul doute que nos grands chefs de ce temps retrouvent dans le talent de Denis Nidos, dans son regard, sa technique, son art, une confirmation de son propos. On ne sait plus si la gastronomie rejoint la photographie. L'inverse aussi. On voit bien que Denis Nidos aime surprendre. Se surprendre et nous surprendre.

Pascal SERRE
Directeur du Journal du Périgord