Laurent QUENEHEN
"H.K."


© Laurent QUENEHEN 2000 - Tous droits réservés
 

Du 13 au 28 mai 2000
Pavillon du Verdurier à LIMOGES

Place Saint-Pierre
Ouvert tous les jours de 14 h à 18 h
Entrée libre


 

L'idée d'agrandir une photographie de cette manière provient d'une discussion que j'avais eue avec une amie. Cette amie traversait une période très difficile, très déprimée, elle se retrouvait à la limite de la psychose. Lorsqu'elle prenait le métro, par exemple, elle se sentait observée par les voyageurs, presque agressée.
Ce sentiment ne la quittait plus lorsqu'elle était dans les transports en commun à tel point qu'elle décida de ne plus les utiliser. Lors d'une discussion, elle me raconta qu'elle avait la sensation de regarder les gens et les choses de trop près, de si près qu'elle avait du mal à les voir dans leur ensemble, si bien qu'ils s'en trouvaient comme déformés. En l'occurence, elle ne
considérait plus les voyageurs comme de simples utilisateurs des transports en commun mais comme des agresseurs potentiels. Ses impressions furent pour moi une mise en exergue de ma propre peur d'autrui. J'essayai de rendre compte de cette perception par le biais de l'image. J'ai tout d'abord pensé faire un simple gros plan mais le zoom photographique accentue le détail et, comme dans les films pornographiques, le gros plan sur une partie est censé représenter le tout. Or dans la dépression mais plus encore dans la psychose, la partie ne représente plus l'ensemble et le tout n'est pas inclus dans la partie. Sans signifiant (la structure), le signifié devient aléatoire, sujet à interprétation. De plus il me fallait restituer la focalisation qui tend à déformer le sujet d'Oli l'idée d'utiliser la photocopieuse qui permet d'avoir un grain très important, une absence de profondeur et une saturation des quelques couleurs présentes. Le fait de reprendre en photocopies et de faire des agrandissements me
permet là encore d'obtenir un rapprochement de la partie sans pour autant rendre compte véritablement de l'ensemble. Lorsque je présente une photographie en plusieurs parties, on peut voir celle-ci dans sa représentation quasi initiale, si l'on se tient à une certaine distance, bien évidemment. Les espaces sont là pour faire fonctionner la structure «Trente rayons se
rejoignent en un moyeu unique ; ce vide dans le char en permet l'usage.» Lorsque l'on se rapproche d'une partie de ces photographies, on entre dans ce que l'on pourrait appeler une perception «phobique» car l'on perd la notion d'ensemble, on entre dans la texture de l'image et il faut reprendre de la distance, reconstituer du vide pour recoller les morceaux.

(l) Lao-Tli (chap.l l). François Cheng. Vide et Plein, le langage piclural chinois. Seuil. Paris, 1991. p. 58

Laurent QUENEHEN